Page:Marie de France - Poésies, éd. Roquefort, II, 1820.djvu/14

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NOTICE.

Tous les fabulistes ont laissé échapper des instructions pour les souverains ; tels furent Bidpaï ou Pilpaï, Lockman, Ésope, Phèdre, puis dans le moyen âge Saint-Cyrille, Romulus et Marie. Ne dit-on pas même que la fable des Bâtons Flottants, auxquels Ésope comparoit la ville de Delphes, coûta la vie à son auteur ? Les crimes de Séjan, ce digne favori de Tibère, n’ont-ils pas été indiqués par Phèdre ? Ne voit-on pas Saint-Cyrille s’élever contre les hommes vicieux et Marie de France attaquer, combattre et livrer à l’infamie, l’affreuse féodalité ? En réfléchissant sur les productions des premiers fabulistes, on voit des sujets qui, pour le bonheur de l’humanité, se chargent d’instruire, de corriger, d’adoucir même le maître orgueilleux auquel ils étoient obligés d’obéir.

L’Angleterre, plus écrasée par le gouvernement féodal que les autres peuples de l’Europe, présentoit le spectacle d’un état partagé entre une foule de petits tyrans qui, fiers de leurs richesses ou de leur pouvoir, ne se soumettoient qu’avec peine à l’autorité du monarque, leur seigneur suzerain. Attentifs aux actions du prince, ils épioient sa conduite, n’attendoient que le relâchement du pouvoir suprême pour lever des