Page:Marillier - La Sensibilité et l’Imagination chez George Sand, 1896.djvu/21

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pouvait elle-même savoir ce qu’elle croyait et jugeait vrai, que lorsqu’elle était seule.

Tant qu’elle n’avait point pris possession de sa pensée par une sorte de discussion intérieure, longuement et solitairement prolongée, tant qu’elle ne l’avait pas faite sienne par une lente et patiente rumination, ce n’était point elle qui pensait à vrai dire, c’étaient les autres qui pensaient en elle et parlaient par sa bouche. Aussi n’est-elle vraiment elle-même que dans ces retraites, peuplées d’amis silencieux, qu’elle a su se faire un peu partout, à Nohant et à Venise, à Gargilesse et à Frascati, à Tamaris ou à Palaiseau.

Et, lorsqu’à la fin de sa vie elle a vécu, au milieu de ces enfants qu’elle aimait, dans un isolement, un détachement plus complet encore des choses du dehors, elle a pour la première fois pris nettement conscience de cette partie d’elle-même, la plus intime peut-être et la plus cachée de l’âme d’un artiste, les