Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne pouvait presque parler, tant il appréhendait que ces clameurs eussent leur effet. Il fit dire au peuple de cesser, qu’il ne s’agissait alors que de rendre grâces à Dieu, et que les autres affaires auraient leur temps. Le peuple admira sa modestie, et Théodose ne la releva pas moins. Il le rendit maître de la maison épiscopale, des revenus ecclésiastiques et de toutes les églises de la ville. Grégoire ne voulut pourtant pas monter le premier jour sur le trône des évêques, mais il paraît qu’on l’y força quelques jours après. Les hérétiques en furent dans une si étrange colère, qu’ils voulurent lui ôter la vie. Un jeune homme fut assez hardi pour l’entreprendre, mais Dieu ne permit pas qu’il l’exécutât ; au contraire, il fut lui-même son propre dénonciateur, et vint se jeter à ses pieds pour lui avouer le funeste dessein qu’il avait eu. Le saint le lui pardonna et le mit au nombre de ses amis, ce qui accrut encore plus dans la ville la haute estime qu’on avait de sa charité et de sa générosité. Quoiqu’il eût pu poursuivre les hérétiques à la rigueur, comme il lui eût été aisé de le faire par la faveur de Théodose, il ne voulut employer que des remèdes doux pour les guérir, espérant que sa modération les rendrait eux-mêmes plus modérés et plus aisés à convertir. Telle fut sa conduite dans ces circonstances si favorables aux catholiques et si humiliantes pour les ariens.

Celle qu’il garda dans le peu de temps qu’il gouverna l’Église de Constantinople, peut bien être proposée pour modèle à former les plus grands prélats. Son désintéressement dans l’administration des revenus de son Église était telle, qu’il n’en voulut jamais profiter, quoiqu’ils fussent très-grands. Il prit un soin particulier des pauvres, des moines, des vierges, des étrangers, des prisonniers, des citoyens, et de toutes les personnes qui faisaient profession particu-