Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/4

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conseillait comme de salutaires moyens qu’on pourrait suivre, si l’on voulait devenir parfait, et qu’on était libre de ne pas suivre, sans qu’on perdît pour cela la vie éternelle.

Il faut donc distinguer dans l’Évangile ce qui est de précepte et ce qui n’est que conseillé comme plus parfait. C’est sur cette distinction que sont fondés deux états différents : l’un, d’une vie commune, où, parmi les embarras de la vie civile, on travaille à se sanctifier en observant fidèlement les préceptes ; l’autre, d’une vie particulière, où, en renonçant aux prétentions du siècle, on s’applique uniquement aux exercices de la religion, et l’on s’efforce de s’élever à la perfection par la pratique des conseils évangéliques.

Tel est le principe de la profession monastique, et ce qui a fait appeler moines, c’est-à-dire seuls ou singuliers, ceux qui l’ont embrassée. Il semble qu’on ne les ait pas ainsi nommés précisément parce qu’ils habitaient seuls dans les déserts, mais à cause de la singularité de leur vie ; et c’est apparemment dans ce sens que Gratien l’a entendu, lorsqu’en citant un canon du concile de Nicée, il dit : « La vie des moines doit être différente de celle des autres chrétiens, comme le porte leur nom, puisque moine, en grec, est la même chose que singulier, en latin ; » et l’auteur de la Hiérarchie ecclésiastique, sous le nom de saint Denis, dit que les moines sont ainsi appelés à cause de la singularité de leur vie.

C’est dans le même sens qu’on peut appeler l’Église naissante de Jérusalem du temps des apôtres un corps ou une communauté de moines, puisqu’on y suivait fidèlement les conseils évangéliques, surtout dans la communauté des biens ; ce qui a fait dire à saint Basile, à saint Jean Chrysostome, à Cassien, que la discipline des cénobites a commencé dès le temps des apôtres, et que les moines ne vivent pas autrement que les premiers fidèles de Jérusalem.

Ainsi l’état monastique, considéré comme une profession expresse des conseils évangéliques, a Jésus-Christ pour instituteur, les apôtres et les premiers fidèles pour modèles, et c’est sur eux que se sont réglés, dans tous les