Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/72

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saint vieillard, qui voulait éprouver sa vertu, ferma sa porte et le laissa attendre dehors. Macaire resta jusqu’à ce que saint Antoine, voyant sa patience, lui ouvrit de nouveau, l’embrassa avec amitié, et lui dit qu’il désirait beaucoup le voir, ayant appris sa manière de vivre. Et, comme il s’aperçut qu’il était fatigué, il exerça envers lui tous les devoirs de l’hospitalité.

Sur le soir, saint Antoine s’occupa à tremper des feuilles de palmier dont il faisait ses nattes, et saint Macaire le pria de lui en donner pour tremper aussi ; ce qu’il fit même, comme étant plus jeune, en plus grande quantité que lui. Ensuite ils s’assirent et s’entretinrent de ce qui regarde le salut en travaillant à leurs nattes, qu’ils descendaient par une fenêtre dans la caverne où saint Antoine demeurait ordinairement. Ce saint y étant entré le lendemain, s’aperçut de la quantité de nattes que Macaire avait faites ; et lui baisant les mains il lui dit : « Voilà des mains où il y a bien de la vertu. »

À son retour à Scété, les solitaires vinrent au-devant de lui, et il leur rapporta qu’il avait vu saint Antoine, et qu’il lui avait dit qu’ils n’avaient point d’église pour célébrer le saint sacrifice. Ils ne lui demandèrent pas d’abord ce que le saint lui avait répondu, mais on se jeta sur d’autres sujets, et lui ne crut pas devoir leur en dire davantage. Sur quoi son historien fait, d’après un ancien, cette belle remarque. C’était une pratique de ces saints, que, quand ils voyaient que leurs disciples ne leur proposaient pas des questions sur des choses utiles à leur âme, ils tâchaient d’en faire naître l’occasion dans leurs entretiens ; que si on ne les pressait pas d’en dire davantage, ils en demeuraient là, de peur qu’on ne dît qu’ils parlaient sans être interrogés, et qu’on ne les accusât de parler sans nécessité.