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Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/12

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LA VILLE CHARNELLE

j’ai pu fouler la Nuit sous mes pas monotones,
la Nuit de miel toute écœurante de chaleur
que la lune, en rampant, empoisonne de fiel.

J’ai devancé la marche pénible de la terre
comme un jongleur debout sur l’oscillation
d’une boule roulante… J’ai vaincu la grande Ourse,
j’ai dépassé l’Aurore enfantine à la course,
et je puis désormais ralentir mon allure
parmi ces palmiers noirs qui tamisent l’azur
et le soyeux murmure de la mer africaine.

Déjà mes pieds cassés savourent la langueur
et l’abandon de cette plage confiante.
Mon oreille extatique évoque la cascade
sonore des galets aux flous éclats de rire,
et voilà qu’en la brume attentive de l’aube
mes yeux peuvent enfin contempler ton profil,
ô toi, Ville opulente aux courbes féminines