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Page:Marius Grout - Le vent se lève.djvu/137

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pense que j’ai pu discuter dom Chautard et — dans quelle innocence, grand Dieu ! — vanter la vie apostolique !

Il semble que je sois en train de tout réviser. Mes jugements mêmes sur les êtres sont différents. Comment, par exemple, ai-je pu sourire de M. le Curé ? Il y a, dans l’apparente facilité de sa sagesse, tant de culture et tant de vraie piété ! Je l’ai entendu hier qui consolait le père Thomas de la perte de sa femme. Il parlait du paradis avec une si simple assurance que le vieil homme regardait là-haut, persuadé que c’était sa faute à lui s’il ne voyait rien, mais qu’il verrait sûrement un jour, qu’il ne fallait que prendre patience.

Je mesure aussi ce qu’il y avait de raide et de ridicule dans mon refus, aux repas de midi, du petit verre de calvados que me proposait M. le Curé. Je l’accepte maintenant, et sans l’ombre d’une inquiétude. Ah ! la vie n’est pas tellement simple, et il est difficile de bien voir clair en soi !

Quelqu’un encore sur qui je me suis trompé, c’est la mère Bisson. Pourquoi lui avoir supposé je ne sais quelles intentions machiavéliques ? J’observais hier comme elle est sensible à la pureté et à la noblesse de mademoiselle de Saint-Englebert. Elle disait : « Ah ! des jeunes filles comme ça… voyez-vous, monsieur l’Abbé ! » Et se retournant vers une rose qu’elle avait derrière elle — nous étions alors