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Page:Marius Grout - Le vent se lève.djvu/32

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Courte visite du docteur Samuel. Il est très bon. « Eh ! bien, nous voilà tout à fait guéri ! » Il me fait un certificat : huit jours de congé encore pour « asthénie ». Je souhaiterais bavarder avec lui, mais il m’impressionne. On dirait qu’il sait tout d’avance, qu’il a, d’avance, tout compris et tout pardonné.

Il fait très doux. Je me sens peu à peu revivre. Comme je suis sensible au printemps ! Thérèse, Thérèse, je ne pourrai jamais te dire ce que, cette nuit, j’ai rêvé. Et même, en dépit de toutes mes promesses, je ne saurais l’écrire ici. J’aurais peur de m’emprisonner. Pourtant, ne le suis-je pas déjà ? Il m’arriva, enfant, de faire un rêve odieux. Je m’éveillai, suant de honte, avec le goût affreux du péché sur la langue. Quelle délivrance de voir, par la lucarne ouverte, la lune toute ronde, et de comprendre que ce n’était qu’un rêve ! Oui, mais trois semaines après…

La petite main de Jeanne — nous sommes allés ensemble ce matin aux primevères — m’a rassuré pourtant autant qu’il se pouvait. La regardant, je me sentais redevenir tout neuf.