Page:Marius Grout - Le vent se lève.djvu/49

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J’étais tout tendre. Que Thérèse eût pensé à cela ! Et qu’elle eût économisé, au long des mois, depuis un an, depuis bien plus d’un an peut-être, sur sa toilette, et sur celle des enfants sans doute pour un objet pour elle aussi futile ! De quoi me plaignais-je ? Comment avoir osé me plaindre ! La vraie Thérèse, la Thérèse de nos fiançailles me fut restituée tout d’un coup. Elle était là, qui attendait. Je l’accusais d’avoir changé, et c’était moi, pauvre bonhomme, qui trahissais !

Le soir, après le repas, je suis monté ici quelques minutes, sous prétexte de fermer la fenêtre, en vérité pour me recueillir. La nuit était toute pleine de lune. Des oiseaux bougeaient dans le feuillage, parmi l’aubépine ou le houx. Qu’il faisait bon ! que c’était bon ! Et beau, et plus qu’on ne saurait dire, que personne jamais n’a su dire, ni ne saura ! Et c’est de ça que nous crevons tous : de ne pas savoir la langue qu’il faut.

Merde, merde, et merde ! Il faut que j’écrive ce mot-là ce matin, avant de partir pour le collège, trois fois. Et une quatrième fois encore : merde ! Là, c’est fait.

Ce n’est pas tout : il faut que je roule les yeux devant la glace, et que je tire sur mes deux joues, par liberté. Oui, par jeu et pure liberté. Pour me prouver que je suis libre 1