Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/154

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Durera, mais, s’il faut, ne se produira plus.
Perdez donc les soupçons qui vous avaient aigrie.
Arbitre de l’amant dont vous êtes chérie,
Que le courroux du moins n’ait, dans ce même instant,
Nulle part dangereuse à l’arrêt qu’il attend.
Je vous ai tu son nom ; mais mon récit peut-être,
Et le vif intérêt que j’ai laissé paraître,
Sans en expliquer plus, vous instruisent assez.

LAODICE

Quoi ! Seigneur, vous seriez… Mais que dis-je ? cessez,
Et n’éclaircissez point ce que j’ignore encore.
J’entends qu’on me recherche, et que Rome m’honore.
Le reste est un secret où je ne dois rien voir.

FLAMINIUS

Vous m’entendez assez pour m’ôter tout espoir ;
Il faut vous l’avouer : je vous ai trop aimée,
Et pour dire encore plus, toujours trop estimée,
Pour me laisser surprendre à la crédule erreur
De supposer quelqu’un digne de votre cœur.
Il est vrai qu’à nos vœux le ciel souvent propice
Pouvait en ma faveur disposer Laodice :
Mais après vos refus, qui ne m’ont point surpris,
Je ne m’attendais pas encor à des mépris,
Ni que vous feignissiez de ne point reconnaître
L’infortuné penchant que vous avez vu naître.

LAODICE

Un pareil entretien a duré trop longtemps,
Seigneur ; je plains des feux si tendres, si constants ;
Je voudrais que pour eux le sort plus favorable
Eût destiné mon cœur à leur être équitable.