Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/263

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assez forte pour soutenir cela, on te jettera par les fenêtres. Ici tu verras tout un peuple rire, battre des mains, applaudir à un spectacle où on se moque de lui, en le mettant bien au-dessous d’une autre nation qu’on lui compare. L’étranger qu’on y loue n’y rit pas de si bon cœur que lui, et cela est charmant.

LE MARQUIS

Effectivement cela nous fait honneur, c’est que notre orgueil entend raillerie.

LE CHEVALIER

Il est moins neuf que celui des autres. Dans de certains pays sont-ils savants ? leur science les charge ; ils ne s’y font jamais, ils en sont tout entrepris. Sont-ils sages ? c’est avec une austérité qui rebute de leur sagesse. Sont-ils fous, ce qu’on appelle étourdis et badins ? leur badinage n’est pas de commerce ; il y a quelque chose de rude, de violent, d’étranger à la véritable joie ; leur raison est sans complaisance, il lui manque cette douceur que nous avons, et qui invite ceux qui ne sont pas raisonnables à le devenir : chez eux, tout est sérieux, tout y est grave, tout y est pris à la lettre : on dirait qu’il n’y a pas encore