Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/294

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BLECTRUE

N’en doutez point, mon cher : j’ai des raisons pour vous dire cela, et je me sens saisi de joie, puisque vous commencez à le soupçonner vous-même. Je crois vous reconnaître à travers le déguisement humiliant où vous êtes : oui, la petitesse de votre corps n’est qu’une figure de la petitesse de votre âme.

LE POÈTE

Eh bien ! seigneur Blectrue, charitable insulaire, conduisez-moi, je me remets entre vos mains ; voyez ce qu’il faut que je fasse. Hélas ! je sais que l’homme est bien peu de chose.

BLECTRUE

C’est le disciple des dieux, quand il est raisonnable ; c’est le compagnon des bêtes quand il ne l’est point.

LE POÈTE

Cependant, quand j’y songe, où sont mes folies ?

BLECTRUE

Ah ! vous retombez en arrière.

LE POÈTE

Je ne saurais me voir définir le compagnon des bêtes.

BLECTRUE

Je ne dis pas encore que ma définition vous convienne ; mais voyons : que faisiez-vous dans le pays dont vous êtes ?

LE POÈTE

Vous n’avez point dans votre langue de mot pour définir ce que j’étais.