Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 3.djvu/401

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merci. — En voilà encore une autre. — Donnez, mon brave homme. — Prends encore cette poignée de pistoles. — Et oui-da, mon bon Monsieur. — Veux-tu me rapporter ce que tu entendras dire à ton maître ? — Et pourquoi cela ? — Pour rien, par curiosité. — Oh ! non, mon compère, non. — Mais je te donnerai tant de bonnes drogues ; je te ferai ci, je te ferai cela ; je sais une fille qui est jolie, qui est dans ses meubles ; je la tiens dans ma manche ; je te la garde. — Oh ! oh ! montrez-la pour voir. — Je l’ai laissée au logis ; mais, suis-moi, tu l’auras. — Non, non, brocanteur, non. — Quoi ! tu ne veux pas d’une jolie fille ?… À la vérité, Madame, cette fille-là me trottait dans l’âme ; il me semblait que je la voyais, qu’elle était blanche, potelée. Quelle satisfaction ! Je trouvais cela bien friand. Je bataillais, je bataillais comme un César ; vous m’auriez mangé de plaisir en voyant mon courage ; à la fin je suis chu. Il me doit encore une pension de cent écus par an, et j’ai déjà reçu la fillette, que je ne puis pas vous montrer, parce qu’elle n’est pas là ; sans compter une prophétie qui a parlé, à ce qu’ils disent, de mon argent, de ma fortune et de ma friponnerie.

LA PRINCESSE

Comment s’appelle-t-elle, cette fille ?

ARLEQUIN

Lisette. Ah ! Madame, si vous voyiez sa face, vous seriez ravie ; avec cette créature-là, il faut que l’honneur d’un homme plie bagage, il n’y a pas moyen.