Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/106

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plus garde à cette minutie-là, elle nous était devenue familière ; et voilà comme tout passe en amour) ; eh bien, nommez-moi, de grâce, les personnes à qui vous appartenez ; instruisez-moi de ce qu’il faut faire pour être connu d’elles ; donnez-moi cette consolation avant que de partir.

À peine achevait-il de parler qu’un laquais entra : Qu’on mette les chevaux au carrosse pour reconduire mademoiselle, lui dit Valville, en se retournant de son côté.

Cet ordre, que je n’avais point prévu, me fit frémir : il rompait toutes mes mesures, et rejetait ma vanité dans toutes ses angoisses.

Ce n’était point le carrosse de Valville qu’il me fallait. La petite lingère n’échappait point par là à l’affront d’être connue. J’avais compris qu’on m’enverrait chercher une voiture ; je comptais m’y mettre toute seule, en être quitte pour dire : Menez-moi dans telle rue ; et, à l’abri de toute confusion, regagner ainsi cette fâcheuse boutique qui m’avait coûté tant de peine d’esprit, et dont je ne pouvais plus faire un secret, si je m’en retournais dans l’équipage de Valville : car il n’aurait pas oublié de demander à ses gens : Où l’avez-vous menée ? Et ils n’auraient pas manqué de lui dire : À une boutique.

Encore n’eût-ce été là que demi-mal, puisque je n’aurais pas été présente au rapport, et que je n’en aurais rougi que de loin. Mais vous allez voir que la politesse de Valville me destinait à une honte bien plus complète.