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Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/201

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Je restai bien encore un demi-quart d’heure dans l’église, tant à essuyer mes larmes qu’à rêver à ce que je ferais le lendemain, si les soins de mon religieux ne réussissaient pas. Que j’envie le sort de ces saintes filles qui sont dans ce couvent ! me dis-je ; qu’elles sont heureuses !

Cette pensée m’occupait, quand une tourière me vint dire honnêtement : Mademoiselle, on va fermer l’église. Tout à l’heure je vais sortir, madame, lui répondis-je, n’osant la regarder que de côté, de peur qu’elle ne s’aperçût que j’avais pleuré ; mais j’oubliai de prendre garde au ton dont je lui répondais, et ce ton me trahit. Elle le sentit si plaintif et si triste, me vit d’ailleurs si jeune, si joliment accommodée, si jolie moi-même, à ce qu’elle me raconta ensuite, qu’elle ne put s’empêcher de me dire : Hélas ! ma chère demoiselle, qu’avez-vous donc ? mon bon Dieu ! quelle pitié ! auriez-vous du chagrin ? c’est bien dommage peut-être venez-vous parler à quelqu’une de nos dames à laquelle est-ce, mademoiselle ?

Je ne repartis rien à ce discours, mais mes yeux recommencèrent à se mouiller. Nous autres filles, ou nous autres femmes, nous pleurons volontiers dès qu’on nous dit : Vous venez de pleurer ; c’est une enfance et comme une mignardise que nous avons et dont nous ne pouvons presque pas nous défendre.

Eh ! mais, mademoiselle, dites-moi ce que c’est ; dites, ajouta la tourière en insistant, irai-je avertir quelqu’une de nos religieuses ? Or, je réfléchissais à ce qu’elle me répétait là-dessus ; c’est peut-être