Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/233

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de dire qu’oui, je n’ose prendre cette liberté-là ; mais si ce que vous me dites m’arrivait, ce serait encore aujourd’hui un des plus heureux jours de ma vie. Vous avez raison, ma fille, me dit Mme de Miran ; et le plus grand service qu’on puisse vous rendre, c’est de prier madame de vous tenir parole, et de vous accorder son amitié. Vous la lui promettez, madame ? ajouta-t-elle en parlant à Mme Dorsin, qui, de l’air du monde le plus prévenant, dit sur-le-champ : Je la lui donne, mais à condition qu’après-vous, il n’y aura personne qu’elle aimera tant que moi.

Non, non, dit Mme de Miran, vous ne vous rendez pas justice ; et moi je lui défends bien de mettre entre nous là-dessus la moindre différence, et j’ose vous répondre qu’elle m’obéira de reste. Je baissai encore les yeux, en disant très sincèrement que j’étais confuse et charmée.

Mme de Miran regarda tout de suite à sa montre. Il est plus tard que je ne croyais, dit-elle, et il faut que je m’en aille bientôt. Je ne vous vois aujourd’hui qu’en passant, Marianne ; j’ai beaucoup de visites à faire : d’ailleurs je me sens abattue, et veux rentrer de bonne heure chez moi. Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit, j’ai eu mille choses dans l’esprit qui m’en ont empêché.