Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/252

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et comme je ne voulais point garder ces vilains présents, que je ne savais point la demeure de cet homme riche qui me les avait donnés, de cet homme de considération dont je vous ai parlé, qui avait fait semblant de me mettre par pitié chez Mme Dutour, et qui avait pourtant des intentions si malhonnêtes, j’écrivis à M. de Valville, qui savait où il demeurait, pour le prier d’avoir la bonté de lui faire tenir le paquet de ma part.

Eh ! par quel hasard, dit Mme de Miran, mon fils savait-il donc la demeure de cet homme-là ?

Eh ! madame, vous allez encore être étonnée, répondis-je ; il la sait, parce que c’est son oncle. Quoi ! reprit-elle, M. de Climal ! C’est lui-même, repris-je. C’était à lui que ce bon religieux dont je vous ai parlé m’avait menée, et ce fut chez vous que j’appris qu’il était l’oncle de M. de Valville, parce qu’il y vint une demi-heure après qu’on m’y eut portée le jour de ma chute ; et ce fut lui aussi que M. de Valville surprit l’après-midi à mes genoux, chez la marchande de linge, dans l’instant qu’il m’entretenait de son amour pour la première fois, et qu’il voulait, disait-il, me loger dès le lendemain bien loin de là, afin de me voir plus en secret, et de m’éloigner du voisinage de M. de Valville.

Juste ciel ! que m’apprenez-vous ? s’écria-t-elle ; quelle faiblesse dans mon frère ! Madame, ajouta-t-elle à ami amie, au nom de Dieu, ne dites mot de ce que vous venez d’entendre. Si jamais une aventure comme celle-là venait à être sue, jugez du tort qu’elle