Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/308

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était être d’un parti que de l’aimer et de lui rendre justice, et d’un autre parti que de la critiquer.

Ses domestiques l’adoraient ; ce qu’elle aurait perdu de son bien, ils auraient cru le perdre autant qu’elle ; et par la même méprise de leur attachement pour elle, ils s’imaginaient être riches de tout ce qui appartenait à leur maîtresse ; ils étaient fâchés de tout ce qui la fâchait, réjouis de tout ce qui la réjouissait. Avait-elle un procès, ils disaient : Nous plaidons. Achetait-elle : Nous achetons. Jugez de tout ce que cela supposait d’aimable dans cette maîtresse, et de tout ce qu’il fallait qu’elle fût pour enchanter, pour apprivoiser jusque-là, comment dirai-je, pour jeter dans de pareilles illusions cette espèce de créatures dont les meilleures ont bien de la peine à nous pardonner leur servitude, nos aises et nos défauts ; qui, même en nous servant bien, ne nous aiment ni ne nous haïssent, et avec qui nous pouvons tout au plus. nous réconcilier par nos bonnes façons. Mme Dorsin était extrêmement généreuse, mais ses domestiques étaient fort économes, et malgré qu’elle en eût, l’un corrigeait l’autre.

Ses amis… oh ! ses amis me permettront de les laisser là ; je ne finis point. Qu’est-ce que cela signifie ? Allons voilà qui est fait.

Où en étions-nous de mon histoire ? Encore chez Mme Dorsin, de chez qui je vais sortir.

Je supprime les caresses qu’elle me fit, et tout ce que les messieurs avec qui j’avais dîné dirent de galant et d’avantageux pour moi.