Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/309

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Il vint quelqu’un. Mme de Miran saisit cet instant pour se retirer ; nous la suivîmes, Valville et moi. Son amie courut après nous pour m’embrasser, et nous voilà partis pour me reconduire à mon couvent.

Dans tout ceci je n’ai fait aucune mention de Valville ; qu’est-ce que j’en aurais dit ? Qu’il avait à tout moment les yeux sur moi, que je levais quelquefois les miens sur lui, mais tout doucement, et comme à la dérobée ; que lorsqu’on me parlait, je le voyais intrigué, et comme en peine de ce que j’allais répondre, et regardant ensuite les autres, pour voir s’ils étaient contents de ce que j’avais répondu ; ce qui, à vous dire vrai, leur arrivait assez souvent. Je crois bien que c’était un peu par bonté, mais il me semble, autant qu’il m’en souvient, qu’il y entrait un peu de justice. J’avoue que je fus d’abord embarrassée, et mes premiers discours s’en ressentirent ; mais cela n’alla pas si mal après, et je me tirai passablement d’affaire, même au sentiment de Mme de Miran, qui, tout en badinant, me dit dans le carrosse : Eh bien ! petite fille, la compagnie que nous venons de quitter est-elle de votre goût ? Vous êtes assez du sien à ce qu’il m’a paru, et nous ferons quelque chose de vous. Oui-da, dit Valville sur le même ton, il y a lieu d’espérer que Mlle Marianne ne déplaira pas dans la suite.

Je me mis à rire. Hélas ! répondis-je, je ne sais ce qui en arrivera, mais il ne tiendra pas à moi que ma mère ne se repente point de m’avoir pris pour sa