Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/310

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fille. Et ce fut en continuant ce badinage que nous arrivâmes au couvent.

Serons-nous longtemps sans la revoir ? dit Valville à Mme de Miran, quand il me donna la main pour m’aider à descendre de carrosse. Je pense que non, repartit-elle ; il y aura peut-être encore quelque dîner chez Mme Dorsin. Comme on s’est assez bien trouvé de nous, peut-être nous renverra-t-on chercher ; point d’impatience ; partez, conduisez Marianne.

Et là-dessus nous sonnâmes, on vint m’ouvrir, et Valville n’eut que le temps de soupirer de ce qu’il me quittait : Vous allez vous renfermer, me dit-il, et dans un moment il n’y aura plus personne pour moi dans le monde ; je vous dis ce que je sens. Eh ! qui est-ce qui y sera pour moi ? repartis-je ; je n’y connais que vous et ma mère, et je ne me soucie pas d’y en connaître davantage.

Ce que je dis sans le regarder ; mais il n’y perdait rien ; ce petit discours valait bien un regard. Il m’en parut pénétré, et pendant qu’on ouvrait la porte, il eut le secret, je ne sais comment, d’approcher ma main de sa bouche, sans que Mme de Miran, qui l’attendait dans son carrosse, s’en aperçût ; du moins crut-il qu’elle ne le voyait pas, à cause qu’elle ne devait pas le voir ; et je raisonnai à peu près de même. Cependant, je retirai ma main, mais quand il ne fut plus temps ; on s’y prend toujours trop tard en pareil cas.

Enfin, me voici entrée, moitié rêveuse et moitié gaie. Il s’en