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Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/317

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sourit quand quelque chose paraît ridicule ; c’était apparemment tout ce qu’elle imagina de mieux pour se défendre ; et vous allez voir sur quoi elle fondait cet ait railleur qu’elle jugea à propos de prendre.

Le souper finit, et nous passâmes toutes ensemble dans le jardin. Quelques religieuses nous y suivirent, entre autres celle dont je vous ai déjà parlé, et qui était mon amie.

Dès que nous y fûmes, mes compagnes m’entourèrent. L’une me demandait : Où avez-vous donc été ? on ne vous a pas vue aujourd’hui. L’autre regardait ma robe, en maniait l’étoffe et disait : Voilà de beau linge, et tout cela vous sied à merveille. Ah ! que vous êtes bien coiffée ! et mille autres bagatelles de cette espèce, dignes de l’entretien de jeunes filles qui voient de la parure.

Mon amie la religieuse vint s’en mêler à sa manière, et s’adressant, malicieusement sans doute, à celle qui me dédaignait tant, et qui s’avançait avec elle : N’est-il pas vrai, mademoiselle, que ce serait là une belle victime à offrir au Seigneur ? lui dit-elle. Ah ! mon Dieu, le beau sacrifice que ce serait si mademoiselle renonçait au monde et se faisait religieuse ! (et vous comprenez bien que c’était de moi dont elle parlait.)

Eh ! mais, ma mère, je crois pour moi que c’est son dessein, et elle ferait fort bien, repartit l’autre, ce serait du moins le parti le plus sûr. Et puis m’apostrophant : Vous avez là une belle robe, Marianne, et tout y répond ; cela est cher au moins, et il faut