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Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/362

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à propos, tenez, c’est chez M. de Valville que je fis porter le paquet de hardes dont M. de Climal lui avait fait présent ; à telles enseignes que j’ai encore un mouchoir à elle, qu’elle a oublié chez moi et qui ne vaut pas grand argent. Mais enfin, n’importe, il est à elle, et je n’y veux rien ; on l’a blanchi tel qu’il est ; quand il serait meilleur, il en serait de même, et ce que j’en dis n’est que pour faire voir si je dois la connaître. En un mot comme en cent, qu’elle parle ou qu’elle ne parle pas, c’est Marianne ; et quoi encore ? Marianne. C’est le nom qu’elle avait quand je l’ai prise ; si elle ne l’a plus, c’est qu’elle en a changé, mais je ne lui en savais point d’autre, ni elle non plus ; encore était-ce, m’a-t-elle dit, la nièce d’un curé qui le lui avait donné, car elle ne sait qui elle est ; c’est elle qui me l’a dit aussi. Que diantre ! où est donc la finesse que j’y entends ? Est-ce que j’ai envie de lui nuire, moi, à cette enfant, qui a été ma fille de boutique ? Est-ce que je lui en veux ? Pardi ! je suis comme tout le monde, je reconnais les gens quand je les ai vus. Voyez que cela est difficile ! Si elle est devenue glorieuse, dame, je n’y saurais que faire. Au surplus, je n’ai que du bien à dire d’elle ; je l’ai connue pour honnête fille, y a-t-il rien de plus beau ? je lui défie d’avoir mieux, quand elle serait duchesse : de quoi se fâche-t-elle ?

À ce dernier mot, la femme de chambre se mit à rire sous sa main et sortit ; pour moi, qui me sentais faible et les genoux tremblants, je me laissai tomber