Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/389

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mais enfin je pardonnerai tout. Tu entends bien ce que je veux dire, Marianne, ajouta-t-elle en souriant.

À quoi je ne répondis qu’en me jetant comme une folle sur une main dont, par hasard, elle tenait alors un des barreaux de la grille.

je pleurai d’aise, je criai de joie, je tombai dans des transports de tendresse, de reconnaissance ; en un mot, je ne me possédai plus, je ne savais plus ce que je disais : Ma chère mère, mon adorable mère ! ah ! mon Dieu, pour quoi n’ai-je qu’un cœur ? Est-il possible qu’il y en ait un comme le vôtre ! Ah ! Seigneur, quelle âme ! et mille autres discours que je tins et qui n’avaient point de suite.

As-tu pu croire qu’une aussi louable sincérité que la tienne tournerait à ton désavantage auprès d’une mère comme moi, Marianne ? me dit Mais de Miran, pendant que je me livrais à tous les mouvements que je viens de vous dire.

Hélas ! madame, est-ce qu’on peut s’imaginer rien de semblable à vous et à vos sentiments ? lui répondis-je quand je fus un peu plus calme. Si je n’y étais pas accoutumée, je ne le croirais pas. Serre donc le parchemin que je t’ai donné, me dit-elle (c’était ce contrat dont elle parlait). Sais-tu bien que, suivant la date de la donation, il t’est déjà dû un premier quartier de la rente, et que je te l’apporte ? Le voilà, ajouta-t-elle en tirant de sa poche un petit rouleau de louis d’or, qu’elle me