Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/431

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quoique le principal, puisqu’il était le maître de la maison, ce que je conjecturai en le voyant sans chapeau. C’était le ministre même, et ma conductrice me le confirma.

Mademoiselle, c’est devant M. de… que vous êtes, me dit-elle. Et elle me le nomma.

C’était un homme âgé, mais grand, d’une belle figure et de bonne mine, d’une physionomie qui vous rassurait en la voyant, qui vous calmait, qui vous remplissait de confiance, et qui était comme un gage de la bonté qu’il aurait pour vous, et de la justice qu’il allait vous rendre.

C’était de ces traits que le temps a moins vieillis qu’il ne les a rendus respectables. Figurez-vous un visage qu’on aime à voir, sans songer à l’âge qu’il a ; on se plaisait à sentir la vénération qu’il inspirait ; la santé même qu’on y voyait avait quelque chose de vénérable ; elle y paraissait encore moins l’effet du tempérament que le fruit de la sagesse, de la sérénité et de la tranquillité de l’âme.

Cette âme y faisait rejaillir la douceur de ses mœurs ; elle y peignait l’aimable et consolante image de ce qu’elle était ; elle l’embellissait de toutes les grâces de son caractère, et ces grâces-là n’ont point d’âge.