Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/450

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du caractère dont elle est. Je suis fâchée qu’elle soit présente, mais vous me forcez de vous dire que sa figure, qui vous parait jolie, est en vérité ce qui la distingue le moins ; et je puis vous assurer que, par son bon esprit, par les qualités de l’âme, et par la noblesse des procédés, elle est demoiselle autant qu’aucune fille, de quelque rang qu’elle soit, puisse l’être. Oh ! vous m’avouerez que cela impose, du moins c’est ainsi que j’en juge ; et que ce je vous dis là, elle ne le doit ni à l’usage du monde, ni à l’éducation qu’elle a eue, et qui a été fort simple : il faut que cela soit dans le sang ; et voilà à mon gré l’essentiel.

Oh ! sans doute, ajouta Valville, qui glissa tout doucement ce peu de mots ; sans doute, et si dans le monde on s’était avisé de ne donner les titres de madame ou de mademoiselle qu’au mérite de l’esprit et du cœur, ah ! qu’il y aurait de madames ou de mademoiselles qui ne seraient plus que des Manons et des Cathos ! Mais heureusement on n’a tué ni leur père ni leur mère, et on sait qui elles sont.

Là-dessus on ne put s’empêcher de rire un peu. Mon fils, encore une fois, je vous défends de parler, lui dit assez vivement Mme de Miran.