Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/145

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Je rougis de ce discours, comme si j’avais eu quelque chose à me reprocher à son égard. Je ne sais, lui répondis-je, qui vous a si bien instruit ; mais on ne vous a pas trompé. Je vous dirai, au reste, que ce n’a été qu’après m’être promise à M. de Sercour que j’ai su que vous étiez son neveu, et que je ne vous aurais point fait un mystère de notre mariage s’il ne l’avait pas exigé lui-même ; c’est lui qui a voulu qu’on l’ignorât, et le seul regret que j’aie dans cette affaire, c’est qu’elle vous prive d’une succession que je n’aurais pas songé à vous ôter. Mais mettez-vous à ma place. Je n’ai point de bien, vous le savez ; et si j’avais refusé le baron, ma mère, qui voudrait être débarrassée de moi, ne me l’aurait jamais pardonné.

Puisque j’avais à perdre le bien de mon oncle, me repartit-il avec un souris assez forcé, j’aime mieux que vous l’ayez qu’une autre.

M. Villot, qui était dans le jardin,. et qui s’approcha de nous, interrompit notre conversation en saluant l’abbé, qui resta encore un quart d’heure, qui me quitta ensuite avec une tranquillité que je ne crus pas vraie, et qui, ce me semble, lui donnait en cet instant l’air d’un fourbe. Voilà du moins comment cela me frappa, et vous verrez que j’en jugeais bien.

Il continua de me voir, et encore plus fréquemment qu’à l’ordinaire, si fréquemment que le baron, qui le sut, m’en demanda la raison. Je n’en sais aucune, lui dis-je, si ce n’est qu’il est mon voisin, et qu’il faut qu’il passe près du logis pour aller chez Mme de Sainte-Hermières, que depuis quelque temps