Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/293

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pressée qui doit nous intéresser mon frère et moi, et vous aussi, madame, puisqu’elle regarde ma mère.

Ce n’est pas à moi, me dit-elle en souriant, qu’elle a coutume de s’adresser pour ses affaires, et je crois qu’à cet égard-là, mademoiselle, il vaut mieux attendre que M. le marquis soit revenu, vous vous en expliquerez avec lui. Son indifférence là-dessus me choqua. Je vis aux mines de tous ceux qui étaient présents qu’on nous écoutait avec quelque attention. Je venais de me nommer ; les airs froids de la jeune marquise ne paraissaient pas me faire une grande impression ; je lui parlais avec une aisance ferme qui commençait à me donner de l’importance, et qui rendait les assistants curieux de ce que deviendrait notre entretien (car voilà comme sont les hommes), de façon que, pour punir la marquise du peu de souci qu’elle prenait de ma mère, je résolus sur-le-champ d’en venir à une discussion qu’elle voulait éloigner, ou comme fatigante, ou comme étrangère à elle, et peut-être aussi comme honteuse.

Il est vrai que ceux que j’avais pour témoins étaient ses amis ; mais je jugeais que leur attention curieuse et maligne les disposait favorablement pour moi, et qu’elle allait leur tenir lieu d’équité.

J’étais avec cela bien persuadée qu’ils ne savaient pas l’horrible situation de ma mère ; et j’aurais pu les défier, ce me semble, de quelque caractère qu’ils fussent, raisonnables ou non, de n’en être pas scandalisés, quand ils la sauraient.

Madame, lui dis-je donc, les affaires de ma mère