Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’aimera ; elle y est résolue, ses discours me l’annoncent ; et suivant toute apparence, ce doit être là un renouvellement de désespoir pour moi. Je vais recommencer à pleurer sans fin, n’est-ce pas ? Point du tout.

Un moment après qu’elle fut sortie de ma chambre, insensiblement mes larmes cessèrent ; cette augmentation de douleur les arrêta, et m’ôta la force d’en verser.

Quand un malheur, qu’on a cru extrême, et qui nous désespère, devient encore plus grand, il semble que notre âme renonce à s’en affliger ; l’excès qu’elle y voit la met à la raison, ce n’est plus la peine qu’elle s’en désole ; elle lui cède et se tait. Il n’y a plus que ce parti-là pour elle ; et ce fut celui que je pris sans m’en apercevoir.

Ce fut dans cette espèce d’état de sens froid que je contemplais clairement ce qui m’arrivait, que je me convainquis qu’il n’y avait plus de remède, et que je consentis à endurer patiemment mon aventure.

De façon que je sortis de là avec une tristesse profonde, mais paisible et docile ; ce qui est un état moins cruel que le désespoir.

Voilà donc à quoi j’en étais avec moi-même, quand cette sœur converse, qui m’avait apporté à manger la veille, arriva. Mme de Miran est ici, me dit-elle ; à quoi elle ajouta : Et on vous attend au parloir ; ce qui ne voulait pas dire que ce fût Mme de Miran qui m’y attendît.

Mais je crus que c’était elle, d’autant plus que Mlle