Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/60

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dît des injures, et le tout par tendresse irritée. D’où vient donc ? Qu’est-ce que cela signifie ?

Non, ma mère, vous ne devez plus y penser, ajoutai-je en me jetant subitement à ses genoux. J’y perds des biens et des honneurs ; mais je n’en ai que faire, ils ne me conviennent point, ils sont au-dessus de moi. M. de Valville ne pourrait m’en faire part sans me rendre l’objet de la risée de tout le monde, sans passer lui-même pour un homme sans cœur. Eh ! quel malheur ne serait-ce pas qu’un jeune homme comme lui, qui peut aspirer à tout, qui est l’espérance d’une famille illustre, fût peut-être obligé de déserter de sa patrie pour avoir épousé une fille que personne ne connaît, une fille que vous avez tirée du néant, et qui n’a pour tout bien que vos charités ! S’accoutumerait-on à un pareil mariage ?

Mais que veut-elle dire avec ces réflexions ? De quoi s’avise-t-elle ? Où va-t-elle chercher ce qu’elle dit là ? s’écria encore Mme de Miran en m’interrompant.

De grâce, écoutez-moi, madame, insistais-je. Dans le fond, ce qu’il y a de plus digne en moi de vos attentions et des siennes, assurément c’est ma misère. Eh bien ! ma mère, vous y avez eu tant d’égards,