Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/62

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même, si je m’en voyais méprisée, si je m’en voyais haïe, comme on le menace que cela arriverait ? Ah ! Seigneur, moi haïe !

À cet endroit de mon discours un torrent de larmes m’arrêta.

Valville, qui, pendant que j’avais parlé, avait fait de temps en temps comme quelqu’un qui veut répondre, mais qu’on ne laisse pas dire, se leva tout d’un coup d’un air extrêmement agité, et sortit de la salle sans que personne le retînt, ou lui demandât compte de sa sortie.

De son côté, Mme de Miran était restée comme immobile. Mme Dorsin, morne et pensive, regardait à terre. Mlle Varthon, plus inquiète que jamais de ce que je pourrais dire, ne songeait qu’à prendre une contenance qui ne l’accusât de rien ; de sorte que nous étions toutes, chacune à notre façon, hors d’état de parler.

Quant à moi, affaiblie par l’effort que je venais de faire, je m’étais laissée aller sur les genoux de Mme de Miran, et je pleurais.

Ces deux dames, après la sortie de Valville, furent quelques instants sans rompre le silence. Ma fille, me dit à la fin Mme de Miran d’un air consterné, est-ce qu’il ne t’aime plus ?

Je ne lui répondis que par des pleurs, et puis elle