Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1827, tome 8.djvu/183

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Je suis d’avis de ne pas m’en aller, lui dis-je, et d’attendre que cet homme ait quitté Mme de Ferval ; n’auriez-vous pas quelque endroit près de celui où ils sont et où je pourrais me tenir ? Je ne vous demande pas ce plaisir-là pour rien, je vous payerai ; et c’était en tirant de l’argent de ma poche que je lui parlais ainsi.

Oui-da, dit-elle en regardant un demi-louis d’or que je tenais ; il y a justement un petit retranchement qui n’est séparé de la chambre que par une cloison, et où je mets de vieilles hardes ; mais montez plutôt à mon grenier, vous y serez mieux.

Non, non, lui dis-je, le retranchement me suffit ; je serai plus près de Mme de Ferval, et quand l’autre la quittera, je le saurai tout d’un coup. Tenez, voilà ce que je vous offre, le voulez-vous ? ajoutai-je, en lui présentant mon demi-louis, non sans me reprocher un peu de le dépenser ainsi ; car voyez quel infidèle emploi de l’argent de Mme de la Vallée ! J’en étais honteux ; mais je tâchais de n’y prendre pas garde, afin d’avoir moins de tort.

Hélas ! il ne fallait pas rien pour cela, me dit la Remy en recevant ce que je lui donnais, c’est une bonté que vous avez, et je vous en suis obligée ; venez, je vais vous mener dans ce petit endroit ; mais ne faites point de bruit au moins, et marchez doucement en y allant, il n’est pas nécessaire que nos gens y entendent personne, il semblerait qu’il y aurait du mystère.

Oh ! ne craignez rien, lui dis-je, je n’y remuerai pas. Et tout en parlant nous revînmes dans la salle.