Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/489

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Dorante.

Après ?

Blaise.

C’est ce qui fait, ne vous déplaise, que je venons vous prier d’une grâce.

Dorante.

Quelle est-elle ?

Blaise.

C’est que faura le troussiau de Lisette, monsieur Dorante ; faura faire une noce, et pis du dégât pour cette noce, et pis de la marchandise pour ce dégât, et du comptant pour cette marchandise. Partout du comptant, hors cheux nous qu’il n’y en a point. Par ainsi, si, par voute moyen auprès de madame la comtesse, qui m’avancerait queuque six-vingts francs sur mon office de jardinier…

Dorante.

Je t’entends, maître Blaise ; mais j’aimerais mieux te les donner, que de les demander pour toi à la comtesse, qui ne ferait pas aujourd’hui grand cas de ma prière. Tu crois que je vais l’épouser, et tu te trompes. Je pense que le chevalier Damis m’a supplanté. Adresse-toi à lui ; si tu n’obtiens rien, je te ferai l’argent dont tu as besoin.

Blaise.

Par la morgué ! ce que j’entends là me dérange de vous remarcier, tant je sis surprins et stupéfait. Un brave homme comme vous, qui a une mine de prince, qui a le cœur de m’offrir de l’argent, se voir délaissé de la propre parsonne de sa maîtresse !… ça ne se peut pas. C’est noute enfant que la comtesse ; c’est défunte noute femme qui l’a norrie. Noute femme avait de la conscience ; faut que sa norriture tianne d’elle. Ne craignez rin,