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Page:Marivaux - Théâtre, vol. II.djvu/186

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Araminte.

Viens ici ; tu es bien imprudent, Dubois, bien indiscret. Moi qui ai si bonne opinion de toi, tu n’as guère d’attention pour ce que je te dis. Je t’avais recommandé de te taire sur le chapitre de Dorante ; tu en sais les conséquences ridicules, et tu me l’avais promis. Pourquoi donc avoir prise, sur ce misérable tableau, avec un sot qui fait un vacarme épouvantable et qui vient ici tenir des discours tous propres à donner des idées que je serais au désespoir qu’on eût ?

Dubois.

Ma foi ! madame, j’ai cru la chose sans conséquence, et je n’ai agi d’ailleurs que par un mouvement de respect et de zèle.

Araminte, d’un air vif.

Eh ! laisse là ton zèle ; ce n’est pas là celui que je veux ni celui qu’il me faut. C’est de ton silence que j’ai besoin pour me tirer de l’embarras où je suis et où tu m’as jetée toi-même ; car sans toi je ne saurais pas que cet homme-là m’aime et je n’aurais que faire d’y regarder de si près.

Dubois.

J’ai bien senti que j’avais tort.

Araminte.

Passe encore pour la dispute ; mais pourquoi s’écrier : « Si je disais un mot ? » Y a-t-il rien de plus mal à toi ?

Dubois.

C’est encore une suite de ce zèle mal entendu.