Page:Marivaux - Théâtre, vol. II.djvu/26

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Lucile.

Et moi, monsieur, je la déclare impertinente ; mais c’est une étourdie qui parle.

Damis.

Votre apparition me déconcerte, je l’avoue ; je me suis expliqué d’une manière si libre, en parlant de personnes aimables, et surtout de vous, madame !

Lucile.

De moi, monsieur ? vous m’étonnez ; je ne sache pas que vous ayez rien à vous reprocher. Quoi donc ! serait-ce d’avoir promis que je ne vous paraîtrais pas redoutable ? Eh ! tant mieux ; c’est m’avoir fait votre cour que cela. Comment donc ! est-ce que vous croyez ma vanité attaquée ? Non, monsieur, elle ne l’est point : supposé que j’en aie, que vous me trouviez redoutable ou non, qu’est-ce que cela dit ? Les goûts d’un homme seul ne décide rien là-dessus ; et de quelque façon qu’il se trouve, on n’en vaut ni plus ni moins ; les agréments n’y perdent ni n’y gagnent ; cela ne signifie rien ; ainsi, monsieur, point d’excuse ; au reste, pourtant, si vous en voulez faire, si votre politesse a quelque remords qui la gêne, qu’à cela ne tienne, vous êtes bien le maître.

Damis.

Je ne doute pas, madame, que tout ce que je pourrais vous dire ne vous soit indifférent ; mais n’importe, j’ai mal parlé, et je me condamne très sérieusement.

Lucile, riant.

Eh bien ! soit ; allons, monsieur, vous vous condamnez, j’y consens. Votre prétendue future vaut mieux que tout ce que vous avez vu jus-