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deux rencontres

gnal s’enfuit toujours et conserve la même distance entre lui et le poursuivant ; il ne peut aller bien loin cependant. Car outre sa blessure qui lui fait perdre sa vigueur avec le sang, la mince couche de verglas qui enfonce sous chacun de ses bonds lui déchire les pattes ; tandis que Charles qui, si l’on veut bien se le rappeler, n’a point quitté ses raquettes de la journée court encore assez facilement ; l’animal perd du terrain et l’homme en gagne. Mais tous deux perdent aussi leurs forces. Le jeune homme ne peut aller loin maintenant ; le sang lui bourdonne dans les oreilles, sa vue s’obscurcit, le délire le reprend. Qu’il trébuche et qu’il tombe et tout est fini !

Telle est son excitation, toutes les facultés de son être sont tellement concentrées sur un seul objet, sa proie, qu’il n’entend pas une détonation non loin de lui et une voix des plus mâles qui lui crie : « Mais, mille tonnerres, arrêtez donc, Monsieur Charles. » Non, il n’entend rien, mais, il voit l’orignal s’abattre lourdement sur la neige. En trois sauts il rejoint l’animal qui se débat contre la mort, lui enfonce dans le flanc son couteau de chasse jusqu’au