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Page:Marmontel - Mémoires de Marmontel - M. Tourneux, Lib. des biolio., 1891, T2.djvu/156

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commence par obtenir que je sois enfermé entre quatre murailles ; on profite du temps de ma captivité pour me calomnier impunément tout à son aise ; et les portes de ma prison ne s’ouvrent que pour me faire voir l’abîme que l’on a creusé sous mes pas. Mais c’est peu de nous y traîner, ma malheureuse famille et moi ; on sait qu’une main secourable peut nous en retirer encore ; on craint que cette main, dont nous avons déjà reçu tant de bienfaits, ne redevienne notre appui ; on nous ôte cette dernière et unique espérance ; et, parce que l’orgueil de M. le duc d’Aumont est irrité, il faut qu’une foule d’innocens soient privés de toute consolation. Oui, Madame, tel a été le but de ces mensonges, qui, en me faisant passer dans votre esprit pour un méchant ou pour un fou, vous indisposoient contre moi. C’est là surtout l’endroit sensible par où mes ennemis avoient su me percer le cœur.

« À présent, pour me mettre hors de défense, on exige de moi que je nomme l’auteur de cette parodie dont j’ai su et dit quelques vers. On me connoît assez, Madame, pour être bien sûr que jamais je ne le nommerai ; mais ne pas l’accuser, c’est, dit-on, me condamner moi-même ; et, si je ne veux pas être infâme, je suis perdu. Certes, si je ne puis me sauver qu’à ce prix, ma ruine est bien décidée. Mais depuis quand, Madame, est--