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Page:Marmontel - Mémoires de Marmontel - M. Tourneux, Lib. des biolio., 1891, T2.djvu/25

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tience. J’allois dîner chez elle, et nous devions nous réjouir ensemble de l’accueil que l’on m’auroit fait. J’allai l’attendre, et lorsqu’elle arriva : « Eh bien ! Madame, lui demandai-je, ne dois-je pas être bien flatté de tout ce qu’on m’a dit d’obligeant et d’aimable ? — Savez-vous, me répondit-elle, à quoi leur dîner s’est passé ? À s’inviter l’un et l’autre à vous parler, sans que ni l’un ni l’autre en ait eu le courage. — Je ne me croyois pas, lui dis-je, un personnage aussi imposant que je le suis ; et, certes, je dois être fier du respect que j’imprime à M. le Dauphin et à Mme la Dauphine. » Ce contraste d’idées nous parut si plaisant que nous en rîmes de bon cœur, et je me tins pour dit tout ce qu’on avoit eu l’intention de me dire.

L’espèce de bienveillance que l’on avoit pour moi dans cette cour me servit cependant à me faire écouter et croire dans une affaire intéressante. L’acte de baptême d’Aurore, fille de Mlle Verrière, attestoit qu’elle étoit fille du maréchal de Saxe ; et, après la mort de son père, Mme la Dauphine étoit dans l’intention de la faire élever. C’étoit l’ambition de la mère ; mais il vint dans la fantaisie de M. le Dauphin de dire qu’elle étoit ma fille, et ce mot fit son impression. Mme de Chalut me le dit en riant ; mais je pris la plaisanterie de M. le Dauphin sur le ton le plus sérieux : je l’accusai de légèreté ; et, en offrant de faire preuve que je n’a-