Page:Marot - Les Œuvres, t. 5, éd. Guiffrey, 1931.djvu/40

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Fors en fuyant la cause de son dueil ?
Là, et au temps gist l’espoir de mon vueil.
Le temps (pour vray) efface toutes choses :
Au long aller mes tristesses encloses
Effacera : toutesfoys attendant
Remede tel, j’endure ce pendant :
Dont maintesfoys vostre face tant belle
Mauldis tout seul d’avoir cueur si rebelle.
Que pleust à Dieu ne l’avoir oncq pu veoir
Ou souvenir jamais d’elle n’avoir.
Croyez de vray que ma presente plaincte
N’est composée en courroux ; ny en faincte :
Faindre n’est point le naturel de moy :
Parquoy vous pry n’en prendre aulcun esmoy,
Ne me hayr, si je [suis] mon contraire, [fuys]
A qui je veulx plus que jamais complaire :
Mais c’est de loing : et pour en faire espreuve,
Commandez moy. Pour vous certes je treuve
Facile chose à faire, ung impossible,
Et fort aisée à dire, ung indicible.
Commandez donc, car je l’accompliray,
Et sur ce poinct un A Dieu vous diray,
Partant du cueur de vostre amour attainct,
Et qui s’attend d’en veoir le feu estainct
Par s’esloigner, puis qu’on ne veult l’estaindre
Par eaue de grâce, où bien vouldroit attaindre.

XIV

Si ma complaincte en vengeance estoit telle,
Comme tu es en abus, et cautelle,
Croy que ma Plume amoureuse, et qui t’a
Tant faict d’honneur, dont tresmal s’acquitta,
Croy qu’elle auroit desjà jecté fumée
Du stile ardant, dont elle est alumée,
Pour du tout rendre aussi noir que Charbon
Le tien bon bruit si tu en as de bon ;