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Page:Marot - Les Œuvres, t. 5, éd. Guiffrey, 1931.djvu/39

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Si fault il bien que vostre cueur entende,
Qu’il n’y a chose au Monde, qui ne tende
A quelcque fin. Homme ne suyt la guerre,
Que pour honneur, ou proufit y acquerre :
Qui ces deux poinctz de la guerre osteroit,
A y servir nul ne se bouteroit.
Homme ne suit le train d’Amours aussi,
Que soubz espoir d’avoir don de mercy :
Et qui ce poinct en osteroit en somme,
D’amour servir ne se mesleroit homme.
Ce nonobstant, vostre je demourray :
Mais ce sera le plus loing que pourray :
Car que me vault veoir de pres, et congnoistre
Tant de beaulté, fors d’atiser, et croistre
Mon nouveau feu ? J’ay tousjours ouy dire,
Qui plus est pres, plus ardemment desire :
Parquoy pour moins ardemment desirer,
Raison me dit qu’il me fault retirer,
En m’asseurant (si je croy son propos)
Que mon esprit par temps aura repos :
Et si promect rendre à ma triste vie
La liberté, que luy aurez ravie :
Et vostre amour (helas) ne me promect
Fors desespoir, qui au tombeau me mect.
Ay je donc tort, si raison je veulx croire
Plustost qu’Amour, qui en mes maulx prend gloire ?
Las, s’en ouvrant ceste bouche vermeille
Vous eussiez mis en mon Cueur par l’oreille
Ung mot d’espoir, travaulx, ennuyz, et peines
M’eussent (pour vous) semblé liesses pleines :
Car doulx espoir conforte la pensée,
Qui bien s’attend d’estre recompensée.
Et moy, qui n’ay espoir, ne seulle attente,
Comment feray ma pensée contente,