Aller au contenu

Page:Marot - Les œuvres de Clément Marot, de Cahors, valet de chambre du roy, 1547.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Tu ne viens veoir: car Virginité pure
Te gardera, sans aucune rompure:
Et de mon corps seras seul joyssant.
   Mais s'ainsi n'est, mon aage florissant
Consummeray sans joye singuliere
En pauvreté, comme une hospitaliere.
   Doncques (Amy) viens moy veoir de ta grâce.
Car tiens toy seur, qu'en ceste pauvre place
Je me tiendray, attendant des nouvelles
De toy, qui tant mes regretz renouvelles.

Rondeau

Rondeau, Duquel les
lettres Capitales portent le nom de l'autheur

   Comme Dido, qui moult se courrouça,
Lors qu'Eneas seule la delaissa
En son Païs: tout ainsi Maguelonne
Mena son dueil: comme tressaincte; et bonne,
En l'hospital toute sa fleur passa.

   Nulle fortune oncques ne la blessa:
Toute constance en son cueur amassa,
Mieulx esperant: et ne fut point felonne,
          Comme Dido.

   Aussi celluy, qui toute puissance a,
Renvoya cil, qui au boys la laissa,
Où elle estoit: mais quoy qu'on en blasonne,
Tant eut de dueil, que le Monde s'estonne,
Que d'un cousteau son cueur ne transpersa,
          Comme Dido.


L'epistre du Despourveu

L'epistre du Despourveu à ma Dame
la Duchesse D'Alençon, et de Berry,
Soeur unique du Roy

   Si j'ay emprins en ma simple jeunesse
De vous escripre, ô treshaulte Princesse,
Je vous supply, que par doulceur humaine
Me pardonnez, car Bon vouloir, qui meine
Le mien desir, me donna esperance
Que vostre noble, et digne preference
Regarderoit par ung sens tresillustre,
Que petit feu ne peult getter grand lustre.
   Aultre raison qui me induit, et inspire
De plus en plus le mien cas vous escripre,
C'est qu'une nuict tenebreuse, et obscure
Me fut advis, que le grand Dieu Mercure
Chief d'Eloquence, en partant des haults Cieulx,
S'en vint en Terre apparoistre à mes yeulx,
Tenant en main sa verge, et Caducée
De deux Serpens: par ordre entrelassée:
Et quand il eut sa face celestine
(Qui