Page:Marot - Les œuvres de Clément Marot, de Cahors, valet de chambre du roy, 1547.djvu/358

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M'ayme d'un cueur tant bon, et desirable,

Qu'on me debvroit appeler miserable,

Si mon vouloir estoit aultre que sien.

Et fusse Helaine au gratieux maintien,

Qui me vint dire, Amy, faiz mon cueur tien,

Je respondroys, point ne seray muable:

Là me tiendray.

Qu'un chascun donc voise chercher son bien:

Quant est de moy, je me trouve tresbien.

J'ay Dame belle, exquise, et honnorable:

Parquoy fussé je unze mil ans durable,

Au dieu d'Amours ne demanderay rien:

Là me tiendray.


XLVIII

De celluy, qui est demeuré, et s'Amye s'en est allée

Tout à part soy est melancolieux

Le tien Servant, qui s'eslongne des lieux,

Là où l'on veult chanter, dancer, et rire:

Seul en sa chambre il va ses pleurs escrire,

Et n'est possible à luy de faire mieulx.

Car quand il pleut, et le Soleil des Cieulx

Ne reluist point, tout homme est soucieux,

Et toute Beste en son creux se retire

Tout à part soy.

Or maintenant pleut larmes de mes yeux,

Et toy, qui es mon Soleil gracieux,

M'as délaissé en l'ombre de martyre:

Pour ces raisons loing des aultres me tire,

Que mon ennuy ne leur soit ennuyeux

Tout à part soy.