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Au Lis, près Melun, le 20 juillet 1815.


Mon véritable ami,


J’avais dessein de ne vous écrire que de Paris, afin de pouvoir vous donner quelques détails sur les individus que j’ai tant sujet de haïr et sur les espérances que je pourrais former, mais il paraît que mon principal ennemi a eu l’adresse de circonvenir le ministre et lui a fait prendre la résolution de ne point me permettre d’aller à Paris. Il me semble que c’est avouer bien clairement qu’on craint que je ne me présente au Roi, et que je ne dévoile aux yeux de Sa Majesté toutes les infamies qu’on a mises en jeu contre moi. Le crime l’emporte cette fois sur l’innocence ; mais je ne crois pas que cette faible victoire soit de longue durée.

D’après les nouvelles que je reçois, l’opinion publique s’est formée à Paris, comme à Besançon. Tout ce qu’il y a d’honnête et de véritablement ami du Roi a de la peine à cacher son indignation contre le monstre qui m’a persécuté, et j’aime à croire que cette opinion en fera justice.

Je vous parle de ces choses parce que je connais l’intérêt que vous prenez à tout ce qui me regarde. Cependant, en prenant la plume, je n’avais le projet que de vous parler de ma vive reconnaissance pour tout ce que vous avez fait pour moi. Soyez bien persuadé que, dans une circonstance pareille, j’ai une âme de feu, et que personne ne sait mieux sentir que moi ; aussi, mon attachement pour vous sera éternel.