Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/21

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échappé au défaut de tous ceux qui écrivent leur propre roman, c’est-à-dire de le rédiger d’une seule fois lorsque l’âge est venu. Il l’a dit lui-même dans sa préface dont je citerai seulement ce passage :

« Dès 1815, j’avais écrit avec l’entrain naïf, la verve enthousiaste de la jeunesse, tout ce qui avait pu frapper mes yeux à peine ouverts et mon cœur encore fermé. J’avais raconté les événements politiques les plus saillants, les anecdotes dont j’avais été le héros ou le témoin. Ces feuilles barbouillées à la hâte étaient le chant printanier de mes belles années. Quelque imparfaites que fussent ces pages, je ne retrouverai jamais la fraîcheur, la grâce qui les avaient dictées.

« Lorsque j’ai quitté Versailles, puis ensuite Mende, j’ai brûlé comme inutiles mon journal et mes papiers. Dès lors, je me suis toujours repenti de cet acte irréfléchi et, pour y remédier, j’ai essayé de reconstruire mon édifice avec ma mémoire et les quelques notes échappées à mon double incendie.

« Si dans les circonstances critiques dans lesquelles ils se trouvent, les hommes écrivaient aussi bien qu’ils pensent, il y aurait quantité de