Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/244

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abandonner la direction des affaires qu’il avait à Paris, il y aurait cruauté à lui enlever aujourd’hui des fonctions dont le traitement est indispensable à son existence et à celle de sa famille.

Mes services furent sans doute appréciés par mes chefs, car au moment de quitter le Jura par suite de la douloureuse maladie névralgique dont il était atteint, le comte d’Orfeuil, ancien préfet de l’Empire et fils d’un ancien intendant de Champagne, donna sa démission en 1831 et me désigna pour lui succéder. Il écrivit donc à M. de Montalivet une lettre très chaleureuse à mon égard et je partis pour Paris muni de cette précieuse dépêche.

En arrivant à Troyes, où la malle-poste s’arrêtait quelques heures, j’entrai au café le plus voisin et, pendant qu’on me préparait à déjeuner, je jetai un coup d’œil sur le Moniteur du jour que le garçon venait de placer près de moi. Stupéfaction ! En tête de la feuille officielle s’étalait une ordonnance royale qui nommait M. Casimir Périer ministre de l’intérieur en remplacement du comte de Montalivet ! J’envoyai le malencontreux garçon au diable, mon déjeuner à sa suite et je sortis brusquement du café, cherchant un moyen d’aborder le nouveau ministre qui ne me connaissait pas, alors que je connaissais personnellement son prédécesseur. Découragé, je continuai ma route sur Paris, où j’arrivai à cinq heures du matin. Je courus m installer à l’Hôtel d’Italie, je m’habillai, et à neuf heures j’étais au ministère de la rue de Grenelle. Comme je deman-