Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/45

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sonnant, on n’entre pas résolument dans un salon. — Pauvre et futile raison, répliquai-je. Quoi ! quand des gens ne vous reçoivent que pour votre nom et non pour celui qui le porte, on ne met pas les pieds chez eux. C’est là de la fierté noble et bien entendue. Et puis toi, qui t’es fait un nom honorable, glorieux, connu de toute l’armée, tu irais troquer ce nom contre un nom sans force, sans valeur et qui viendrait effacer tout ce qu’il y a dans ta vie de beau et de grand ? Quelle sottise ! »

Lefaivre ne me paraissant pas convaincu, je lui proposai d’aller consulter notre vieil ami et compatriote, le général de Préval, dans le jugement duquel il avait une pleine confiance. Aussitôt dit, aussitôt fait. Arrivés chez le général, je lui expliquai sans préambule l’objet de notre visite : « Quelle idée absurde vous avez là, mon cher Lefaivre, s’écria notre excellent compatriote ; elle est trop en dehors de vous pour que vous l’ayez conçue ; elle vient nécessairement de votre fils Victor, que je reconnais bien là. Envoyez-le moi, je le confesserai et je vous le renverrai convaincu qu’il ne peut que perdre à changer de nom. » Lefaivre parut décidé à en rester là de ses démarches, mais depuis que j’ai quitté Paris, on m’a assuré qu’il avait présenté une demande officielle afin d’obtenir et qu’il avait obtenu, en effet, l’autorisation d’ajouter à son nom celui de des Ayvelles. Je n’ai pas vérifié le fait, mais je ne serais pas surpris qu’il fût exact, parce qu’en général, plus une idée est saugrenue, plus vos