Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/44

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Franc et loyal, Lefaivre n’avait aucune arrière-pensée. Son conseil était sage ; médiocre raison pour qu’il fût suivi. Cependant M. de Saint-Jacques, après quelques réflexions, l’adopta et sur sa propre demande fut envoyé en garnison à Toulouse. Sa passion pétilla comme un feu de paille et s’éteignit aussitôt. Pendant ce temps, Lefaivre perdit complètement la tête et malgré les justes observations faites jadis au baron de Saint-Jacques et répétées à lui mot à mot par une voix amie, il épousa Mlle  Élise Chéry ! Aurait-il mieux fait de changer de garnison ? Il peut seul répondre à cette question indiscrète.

Quoique héroïque soldat consacré par l’Empereur, quoique colonel, quoique commandeur de la Légion d’honneur et chevalier de Saint-Louis, mon oncle eut plus tard la ridicule fantaisie de vouloir ajouter à son nom celui de des Ayvelles qui était le nom de sa mère ou même de sa grand’mère. Lorsque j’étais au ministère de l’intérieur, il vint un jour m’y demander quelles étaient les démarches à faire pour parvenir à ce but. Il était facile de voir que Lefaivre, dont les habitudes simples, modestes et surtout le bon sens ont été de tout temps appréciés, n’avait pu concevoir cette pensée de son chef. — « Cette idée de changer de nom, lui dis-je de suite, ne vient pas de toi ; elle a pris naissance dans le cerveau fêlé de ton fils Victor, qui est plein de vanité puérile et n’aime que le clinquant. — Oui, en effet, me répondit mon oncle, Victor dit que tout le monde s’appelle Lefaivre, et avec un nom si mal