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Page:Martel - Les Cévennes et la région des causses, 1893.djvu/228

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la vis et l’hérault

30 juin et 1er juillet 1889, dans notre canot d’Osgood (V. p. 150), nous avons, pour la première fois, suivi le fleuve de Saint-Bauzille à Saint-Guilhem : périlleuse entreprise, à cause des innombrables remous et rapides qui barrent la route ; très fatigante surtout, car dans maints endroits, où les rives se trouvaient à pic et le lit encombré d’écueils redoutables, il fallait se plonger entièrement dans l’eau, s’accrocher d’une main aux aspérités du roc et retenir ou diriger de l’autre la frêle embarcation parmi les obstacles. Deux fois elle faillit nous échapper, emportée par le courant très violent ; trois fois un ratch formant coude nous jeta irrésistiblement sur les branchages qui hérissaient les bords et manqua de nous faire chavirer, sans parler des paquets d’eau embarqués qui

Château de Brissac. – Phot. Clabanon.

auraient pu nous couler à pic ; ce ne fut pas précisément une partie de plaisir, le labeur étant excessif pour deux hommes seuls, et les portages par trop multipliés : le plus grand planiol où l’on puisse naviguer à l’aise n’a pas un kilomètre de longueur ; nous dûmes opérer plus de cinquante débarquements. Aussi, malgré l’ineffaçable souvenir laissé par le charme indicible du bain libre dans l’onde limpide, du chemin inconnu à découvrir, du campement solitaire dans une anse retirée, de l’admirable nuit d’été passée en plein air, à 4 kilomètres de toute habitation humaine, et de la splendeur d’un ciel sans nuages, ne nous sentons-nous nulle envie de la recommencer. Il est fâcheux qu’un vrai chemin de piétons tout au moins ne se continue pas sans interruption sur la rive droite, car on admirerait là des sites presque dignes du Tarn, la crête du sommet Baudran (257 m.), le planiol du moulin Bertrand, la cascade et le moulin des Figuières, avec sa vieille tour de défense, la muraille de Puéchabon (482 à 505 m.) surtout, haute de 400 mètres, longue de 3 kilomètres et verticale : à quoi bon décrire