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calvaire

égalait volontiers à celui des vierges, et qu’elles avaient leur domaine propre dans le patrimoine de la foi commune.

Chapelle du Calvaire.

Une veuve, née en des jours de scepticisme et d’ignorance religieuse, réapprit cela aux générations du commencement du siècle passé. Lyon avait vu Mme Perrin enrichir d’une province « la province dolente » l’apostolat des vierges. Mme Garnier s’appliqua à des misères semblables, mais par des moyens qu’elle n’imita de personne. Elle était fille de modestes commerçants, les époux Chabot ; elle se maria avec un commerçant que son intelligence et son esprit pratique aidèrent jusqu’à l’enrichir presque ; elle le perdit bientôt par la mort, avec les deux enfants nés de cette union, où l’amour n’avait été diminué d’aucune faiblesse ni d’aucun calcul. Elle pleura beaucoup, donna ses larmes à Dieu ; elle apprit du Maître, que pour sanctifier et garder sa souffrance, elle devait soulager la souffrance d’autrui : toute l’histoire de cette âme choisie peut se renfermer en ces mots. Ce fut jusqu’à son veuvage une riche histoire intérieure parmi les banalités d’une vie sans éclat.

Mme Garnier avait d’ailleurs un caractère des plus primesautiers, même des plus violents : il lui en resta l’expansion. Enfant, elle avait dû quitter les Visitandines, ses maîtresses qui l’aimaient pourtant plus qu’aucune de leurs élèves, parce qu’elle leur montrait les extrémités de l’espièglerie et de la colère : ne menaça-t-elle pas un jour de mettre le feu au couvent ! Et sa piété était comme son caractère ; elle brûlait à l’égal d’une flamme ardente, puis vacillait au vent des caprices. Bref, son abondante nature spirituelle allait en toutes choses au delà : « Vous êtes à Dieu, lui dit franchement un prêtre, peu cicéronien, après qu’elle fut entrée dans sa vraie vocation, du pas rapide qui était son pas ; c’est grande chance ! car si vous eussiez été au diable, vous eussiez fait autant de mal que vous faites de bien ! »