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histoire des églises et chapelles de lyon

En 1629, le grand autel est orné d’un tabernacle ou ciborium en bois de noyer et de tilleul ; on place les deux statues encore existantes de saint Bruno et de saint Jean-Baptiste, œuvres du sculpteur Sarazin ; mais bientôt les religieux sont à bout de ressources et les travaux sont interrompus de 1630 à 1646. En cette dernière année, le prieur dom Christophe d’Outreleau donne à prix fait « le parachèvement de l’église suivant le dessin qui sera fourni » : deux des chapelles du couchant étaient à terminer ; celles du levant n’étaient pas commencées ; le dôme ne présentait à la vue que ses piliers et ses arcs doubleaux. Ce bel essor, hélas ! se brise bientôt : une dépense de 17.000 fr. a absorbé en deux ans tout l’argent amassé. Les comptes du monastère présentent une nouvelle dépense de 25.000 fr. en 1633, puis, dans la longue durée de quatre-vingts ans, les frais indispensables pour ne pas laisser aller en ruines ce qui était déjà fait : c’est ainsi qu’en 1690 on fermait par un mur de pisé les arcades des chapelles de droite.

Un nouveau prieur, dom Claude Guinet, assume enfin la tâche de terminer l’œuvre de ses prédécesseurs. La mort la lui arrache des mains ; mais son successeur, dom Gabriel Prenel, la reprendra et ne la laissera pas qu’elle ne soit achevée : il s’adresse à un architecte de grand talent, Ferdinand-Sigismond Delamonce. Plan et devis sont remis le 1er novembre 1733 ; au 10 mars de l’année suivante, le prieur passe les conventions avec Delamonce, qui devra « parachever l’église au dedans et au dehors, disposer le vieux sanctuaire selon le nouveau plan, faire les trois murs circulaires sous le dôme, etc. » Ce dernier point fait supposer que, dans le plan primitif de Magnan, les arcades sous le dôme devaient rester vides, et que Delamonce y mit des murs pleins, soit qu’il jugeât la chose meilleure au point de vue de l’art, soit qu’il voulût asseoir plus solidement la coupole qu’il devait élever. Dans la convention il était stipulé que l’architecte serait nourri au monastère et recevrait mille francs pour ses dessins et sa peine, que les ouvrages eussent à durer une ou plusieurs années.

Delamonce, ayant à prendre l’œuvre au point où elle en était, se trouvait nécessairement gêné dans ses conceptions : un mémoire de lui à l’Académie de Lyon témoigne de cette gêne qu’il eut à subir. Ainsi, il n’aurait pas admis, comme on les voit, les ressauts de l’entablement qui ne permettent pas aux métopes d’être disposés d’une façon régulière entre les triglyphes ; à son avis, les arcades des chapelles sont trop basses ; trop basse aussi la nef par rapport à sa largeur ; les alettes du jambage des piliers et leurs archivoltes sont trop larges, leurs moulures trop pesantes. Il dut se borner à corriger dans les limites du possible, et notamment les piédestaux massifs qui formaient près d’un tiers de la hauteur des pilastres, ainsi que les jambages des quatre grandes arcades du dôme. Le tailleur de pierre eut « à mutiler, tailler les anciennes bases, cimaises et corniches des vieux piédestaux, des quatre jambages des piliers sous le dôme, à faire l’enfoncement afin d’établir la nouvelle base dorique à chacun des piliers, et à tailler les nouveaux sur les profils de M. Delamonce. » Il fallut aussi surélever les murs où s’ouvrent les fenêtres de la nef et celles du chœur ; ces dernières furent même reportées beaucoup plus haut qu’elles n’étaient. Comme le chœur avait été jusqu’alors une sorte d’église indépendante, fermée par un mur du côté du sanctuaire, le mur fut démoli et remplacé,