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histoire des églises et chapelles de lyon

un autre. Il appartient à ceux qui savent et se souviennent de retracer les faits historiques que l’on n’efface pas comme un nom sur une plaque municipale.

L’église Saint-Michel, fondée à la fin du ve siècle, et, pour se servir d’une expression qui n’a rien d’archaïque, désaffectée en 1690, était située entre l’ex-place Saint-Michel et la Saône. D’après Steyert, elle s’élevait sur l’emplacement des maisons qui bordent la rue Martin au nord, son bas-côté méridional débordant sur le sol qui est la chaussée actuelle de cette rue. Les anciens plans de Lyon nous la montrent au contraire un peu à gauche du prolongement de la rue Sainte-Hélène, par conséquent à la place des maisons bâties au sud de la rue Martin.

L’histoire de sa fondation est connue par une inscription latine de vingt-six vers, tirée d’un vieux manuscrit et insérée au recueil de Duchesne, Scriptores historiæ Francorum, qui a sauvé de l’oubli tout ce que l’on sait de sa royale fondatrice. Carétène, femme d’un roi bourguignon, née vers l’année 453, morte en 500, fit bâtir une église qu’elle dédia à saint Michel Archange, avec un monastère, où elle-même se consacra à Dieu, mourut et fut enterrée, et où, suivant une croyance fondée sur de sérieuses données, elle avait formé, à l’ombre du cloître, l’esprit de la jeune Clotilde, qui devait épouser Clovis et exercer une si grande influence sur la conversion des Francs.

Une opinion assez répandue est que Carétène fut la femme de Gondioc, roi de Bourgogne, père de Gondebaud et de Chilpéric et par conséquent l’aïeule de Clotilde, fille de ce dernier. D’autres historiens et parmi eux MM. Allmer et Dissard, auteurs des Inscriptions antiques du Musée de Lyon, rejettent cette opinion parce que Carétène n’avait que huit ans à la mort de Gondioc et croient que Carétène fut la femme de Gondebaud ; ils s’appuyent sur le récit de Grégoire de Tours et sur diverses considérations historiques. Suivant eux, Carétène aurait été la tante de Clotilde. Alphonse de Boissieu a consacré dans son livre, Les Inscriptions antiques de Lyon, une dissertation à l’épitaphe de Carétène. Opposant le témoignage de saint Avit, contemporain de celle princesse, à celui de Grégoire de Tours, il a refait l’histoire de Gondebaud et de Clotilde et montré que parmi les fils de Gondioc, Chilpéric est le seul dont elle ait pu devenir la femme. Elle ne fut donc ni l’aïeule, ni la tante de Clotilde ; elle fut sa mère. Du reste, les diverses hypothèses permettent de lui attribuer le rôle d’éducatrice de la future reine des Francs. Il est dit dans son épitaphe : præclaram sobolem dulcesque gavisa nepotes ad veram doctos sollicitare fidem. Ces mots peuvent laisser entendre que ce ne fut pas seulement à sa descendance directe qu’elle s’appliqua à enseigner la vraie foi. Le souvenir de sainte Clotilde s’est conservé à Lyon par le culte qui lui est rendu à Ainay dont elle est une des patronnes secondaires, où elle a eu une statue, où elle figure dans la fresque d’Hippolyte Flandrin, enfin par la fondation que son fils Childebert fit, en 542, du plus ancien hôpital lyonnais, un des premiers créés en France.

Le quartier d’Ainay, à l’époque où Carétène y fondait une église et un monastère, n’était pas un lieu désert, comme pourrait le faire croire sa situation dans une île séparée de la presqu’île par un canal qui mettait les deux fleuves en communication avant le confluent. Ce territoire était traversé par une voie romaine devenue la rue Sainte-Hélène, bordée